Le village Médiéval de Curemonte
Curemonte s’étire sur un éperon rocheux orienté nord sud. Pour les hommes qui s’y sont installés, ce site aux pentes escarpées, avait un caractère défensif évident. En outre, encore aujourd’hui beaucoup de maisons ont un puits. La présence d’eau a dû être un élément déterminant dans le choix de cet emplacement.
Histoire de Curemonte
La première mention écrite de Curemonte date de l’an 860, dans le « Cartulaire de l’Abbaye de Beaulieu ». Il s’agit d’un don de vigne fait à l’abbaye par Rodolphe de Turenne.
A l’époque médiévale, le bourg était constitué du castrum supérieur et du castrum inférieur avec une limite approximative au niveau de l’actuelle halle, ce qui correspond à ce qu’on désigne aujourd’hui par le haut du bourg et le bas du bourg. Cette limite est située au niveau du 45ième parallèle qui traverse le bourg. Curemonte était une des places fortes de la Vicomté de Turenne qui fut le dernier « état » féodal du royaume de France.
Le rocher de Curemonte
Le bâti de Curemonte a constamment évolué en lien avec l’activité humaine. A l’origine, les ruelles du bourg ont été percées dans le rocher de grès et les maisons construites sur ce rocher sans doute en grande partie avec les pierres extraites sur place. Les traces sont encore bien visibles aujourd’hui.
L’enceinte?
On retrouve à Curemonte d’assez nombreux vestiges d’éléments médiévaux1, baies et portes mais certains d’entre eux ont été remontés postérieurement. En déambulant dans le bourg, on peut encore apercevoir la présence de meurtrières sur certaines façades. Ces maisons alignées devaient être des bâtiments défensifs, éléments d’enceinte.
D’autres vestiges médiévaux existent à Curemonte, une grande salle voutée sous la halle actuelle notamment.
L’existence d’un prieuré féminin de l’ordre de Malte est attestée à Curemonte.2
Les familles nobles
Plusieurs familles seigneuriales3 ont cohabité à Curemonte. Les plus anciennes étaient les Curemonte et les Plas. Raymond de Curemonte a participé à la première croisade aux côtés de son suzerain Raymond de Turenne et du comte de Toulouse. Ces familles occupaient alors le castrum haut. On y mentionnait aussi les Aymar, dont le blason orne une des tours du château de Saint-Hilaire et les Vassal au château de la Johannie. Cette liste n’est pas exhaustive, d’autres familles nobles sont attestées. Dans le castrum bas la principale famille était quercynoise, les Cardaillac. Toutes ces familles étaient organisées en coseigneurie ce qui leur permettait de partager les revenus mais aussi les frais d’entretien de leurs demeures et bien sûr de nouer de nombreuses alliances matrimoniales. Au XVIIième siècle, ne subsistaient que les Plas et les Cardaillac et en 1693 les Plas achetèrent aux Cardaillac le Château de Saint Hilaire. Ils devinrent alors les seuls seigneurs de Curemonte.
Les trois châteaux
De ces trois châteaux, le plus ancien est celui de Saint-Hilaire, aux tours carrées, édifié au XIVième-XVième siècle. Le château de la Johannie date approximativement de la même époque. Le château de Plas, aux tours rondes, a été édifié un siècle plus tard par Jean de Plas. Ces châteaux ont dû remplacer des constructions antérieures qui existaient dans le castrum haut. Les châteaux St Hilaire et Plas ont été réunis par un bâtiment construit par Guy Joseph de Plas en 1693. Le château de Saint-Hilaire possédait une barbacane. Celle-ci était située à l’emplacement actuel du monument aux morts et s’élevait sans doute sur une plate-forme de grès. Cette plate-forme, haute de 3 à 4 mètres, a été arasée en 1856 pour créer un jardin potager. Ce jardin fut exproprié par la municipalité en 1872 pour l’agrandissement du foirail.
Les châteaux après la révolution
Après la révolution, les châteaux de Saint-Hilaire et de Plas furent mis en vente en 1829. Pour les Plas, c’est la fin d’une présence de plus de 700 ans à Curemonte. A la même époque, le Château de la Johannie appartenait à une famille de Curemonte, les Riol. Ce fut pour les trois châteaux le début d’une période d’instabilité et d’abandon qui ne s’acheva qu’au début des années 1970 quand les nouveaux propriétaires du château de la Johannie et des châteaux de Saint-Hilaire et de Plas entreprirent les travaux de restauration considérables qui ont permis la sauvegarde de ces monuments essentiels à l’attrait de Curemonte.
Colette à Curemonte
Ces châteaux ont aussi permis à Curemonte d’entrer dans la littérature. En effet Saint-Hilaire et Plas ont appartenu à la famille de Jouvenel entre 1912 et 1948. Par voie d’héritage, c’est Colette de Jouvenel dite « Bel-Gazou », fille d’Henri de Jouvenel et de l’écrivaine Colette qui en était propriétaire depuis 1935. Elle y accueillit sa mère quelques semaines durant l’été 1940. La grande Colette consacre une partie de son livre « journal à rebours » à ce séjour à Curemonte.
Olga et les siens4
Olga Nusinoff, une femme seule, juive polonaise passée par l’Allemagne des années 1920, arrive en France en 1933. Dans la débâcle de l’été 1940, elle échoue à Curemonte. Elle s’y intègre, et grâce aux habitants sauve presque tous les siens. Ensemble, ils traversent la guerre et, à deux personnes près, échappent à tous les dangers. Ce petit groupe va survivre grâce à des personnages merveilleux, qui n’acceptent pas que l’on persécute ces immigrés, des habitants du village notamment. A Curemonte, elle rencontre deux figures exceptionnelles: Colette de Jouvenel, qui accueille les fuyards et les prend en charge non loin de son château, et sa mère la grande Colette.
Les maisons nobles
Le bourg de Curemonte possède également six maisons nobles dont la caractéristique est d’avoir une tour qui mettait en évidence la position sociale du propriétaire. Cette tour abrite un escalier à vis qui permet de desservir le corps de logis. Telles que nous les voyons aujourd’hui, ces maisons datent des XVIième-XVIIième siècles mais avec des éléments architecturaux antérieurs et des modifications postérieures. Certaines ont de beaux éléments renaissance, fenêtres à meneaux ou portails.
Les trois églises
Les églises de Curemonte sont toutes les trois d’époque romane. Elles ont vraisemblablement été édifiées sur des sanctuaires plus anciens. L’association Les Amis de Curemonte a participé à la restauration de ces églises et vous trouverez des informations sur ces édifices dans la rubrique « Réalisations »
Les deux derniers siècles
La comparaison du plan cadastral dit Napoléonien, qui pour Curemonte date de 1832, au cadastre actuel, montre que l’homogénéité du bourg est conservée. On note quelques bâtiments nouveaux, d’autres ont disparu. Par ailleurs, un certain nombre de petites maisons sont aujourd’hui réunies en une seule, plus grande.
De la vigne à l’élevage
Le milieu du XIXième siècle est la période où Curemonte compte le plus d’habitants, environ 1200 sur la commune. L’activité majeure est alors la culture de la vigne5, un peu moins de 200 ha sur les 900 ha de la commune. Le commerce du vin se pratique beaucoup avec le Cantal voisin (vin contre fromage). Les maladies de la vigne, phylloxéra en particulier, puis la première guerre mondiale vont faire disparaître cette culture qui nécessitait une main d’œuvre abondante. La décrue de la population est assez rapide, un peu moins de 600 habitants en 1921. L’élevage remplace alors la vigne et des maisons sont transformées en grange ou écurie. La seconde moitié du XXième siècle a vu une réduction drastique du nombre d’exploitations agricoles avec en parallèle une augmentation de leur taille. A Curemonte, les agriculteurs ont peu à peu quitté le bourg sans doute devenu malcommode, granges et écuries étriquées, pour des cheptels de plus en plus importants. Beaucoup de ces bâtiments agricoles sont alors, après restauration, redevenus des maisons d’habitation, souvent des résidences secondaires.
- Dimitri Paloumbas « Inventaire du bâti médiéval » Colloque Historique Actes 2009 (organisé par les Amis de Curemonte) ↩︎
- Jean Bouyssou « Le prieuré féminin de Curemonte » ↩︎
- Marguerite Guély « Familles seigneuriales de Curemonte » Colloque Historique Actes 2009 (organisé par les Amis de Curemonte) ↩︎
- Alain Jomy « Olga et les siens » disponible à la vente sur la boutique des Amis de Curemonte en cliquant ici ↩︎
- Jean Bouyssou « Histoire de la vigne en basse-Corrèze et à Curemonte » Colloque Historique Actes 2012 (organisé par les Amis de Curemonte) ↩︎